
Certes la Senelec a opéré des délestages ponctuels, consécutifs à une situation conjoncturelle liée, d’une part au déroulement d’un programme de maintenance perturbé par l’occurrence inopinée d’incidents d’exploitation notamment au niveau de la centrale de GTI (50 MW) et d’une machine de Bel Air(15 MW) ; et d’autre part à un dysfonctionnement dans son approvisionnement en combustibles dû au renchérissement combiné (fuel plus gasoil) de plus de 60% du prix de ses combustibles sans répercussion sur les consommateurs. Il est à noter que la puissance actuelle du parc de production est suffisante pour satisfaire la demande. La Senelec a levé la contrainte sur le combustible avec l’intervention du Gouvernement en payant une partie de la compensation pour 20 milliards de FCFA et du paiement par la Banque Mondiale de l’appui budgétaire pour le redressement durable du secteur de l’Energie destiné à la recapitalisation le 25 septembre 2008 de 24 milliards FCFA (pour éviter une augmentation brutale des tarifs supplémentaires pour les consommateurs conformément à la décision de la Commission de Régulation du Secteur de l’Électricité) et la Senelec est en train d’accélérer les dispositions idoines pour remettre en service les installations à l’arrêt, et répondre à sa mission de service public de qualité, tout comme elle le faisait depuis le début d’année, période pendant laquelle, vous sembliez muet. Les quarante ans d’histoire du secteur de l’énergie du régime socialiste, entre 1960 et 2000 ont illustré quatre problèmes majeurs, à savoir : Une accumulation des pertes financières entre 1986 et 1998, occasionnant un report à nouveau de moins -140 Milliards en 1999 inscrit dans les comptes de la Société depuis 1999, nécessitant obligatoirement une recapitalisation, pour se conformer aux normes des dispositions de l’OHADA, en vigueur. Une stratégie non prospective de développement du parc de production, basée essentiellement sur des machines thermiques type turbines à gaz utilisant le combustible liquide le plus couteux de la Senelec et induisant une dépendance à plus de 90% aux produits pétroliers. Nous connaissons aujourd’hui les conséquences désastreuses de cette politique avec l’envolée du prix du baril de pétrole. Une absence de stratégie d’accompagnement de Senelec, qui lui aurait permis de réaliser un plan d’équipement optimal en production avec des machines de base performantes. Au demeurant, vous avez régulièrement attendu la pénurie de production, pour opérer des investissements inappropriés, notamment en « fonçant » sur les turbines à gaz. Ces turbines sont des unités d’appoint qui induisent les coûts de production les plus élevés du parc de la Senelec, ce qui a, de surcroît, augmenté le déficit de trésorerie de la société compte tenu de la croissance exceptionnelle en demande d’énergie de 7,5% et leur utilisation en base, étant donné que ces surcoûts ne peuvent être répercutés aux usagers (cf la loi que vous avez élaborée et votée en Avril 1998). Pour votre exemple on peut citer les turbines à Gaz : n°1 en 1971, n°2 en 1984, n°3 en 1995. La turbine à gaz n°4 et celle de GTI ont été installées simultanément en 1999, à la suite du déficit persistant de production de cette période. Et le rationnement de l’électricité d’alors était plus contraignant pour les populations. Une privatisation précipitée en 1999, qui a abouti à une dégradation démesurée de la qualité de service, liée à un manque d’investissement et de recapitalisation financière de la part des « partenaires stratégiques ». Cette situation a précipité le départ de ces derniers. Car on leur avait « fourgué une mariée vérolée », pour préciser vos propos tenus durant l’émission. Je rappelle que cette privatisation a été décriée et rejetée par le personnel de la Senelec, démobilisé et mis en prison pour certains. Au terme inéluctable de cette privatisation, la Senelec ne comptait en 2000 qu’une puissance disponible de 340 MW. Ce faisant, à l’exception des diesels de 60 MW de la centrale C4, les machines du parc de production, étaient pour l’essentiel âgées de plus de 30 ans, avec deux turbines à gaz, la TAG3 et la TAG4, acquises d’occasion à plus de vingt ans d’âge. La politique du régime socialiste pour le secteur de l’énergie était tout simplement en décalage avec les besoins de Senelec et des consommateurs sénégalais. Avec un parc de production conçu pour fonctionner avec les produits pétroliers, dont le renchérissement mondial des cours est insoutenable, Senelec subit aujourd’hui des charges d’exploitation qui impliquent une réalité tarifaire, que le Chef de l’Etat a tenu à atténuer pour les consommateurs, notamment ceux aux revenus faibles et intermédiaires, en instruisant l’économie d’énergie et la limitation des hausses de tarifs, à un niveau inférieur à celui requis et fixé par la Commission de Régulation du Secteur de l’Electricité, avec en contrepartie le versement d’une compensation à Senelec d’environ 147 Milliards entre 2004 et 2008. Pour l’heure, 120 Milliards ont été versés pour éviter la répercussion directe de l’augmentation des prix du combustible sur le consommateur. Face à ce lourd héritage, mais comptant sur l’engagement du personnel remobilisé de Senelec et la collaboration des partenaires au développement, la société a réalisé en 2002 l’interconnexion avec la centrale hydroélectrique de Manantali, pour une puissance de 66 MW. Cette interconnexion a été précédée en 2001 par la réhabilitation de la turbine à gaz n°2 de 20 MW et suivie par l’extension de 30 MW de la centrale Diesel C4 en 2003. Par ailleurs, le Gouvernement en application des directives et des orientations de Monsieur le Président de la République, a procédé à un diagnostic méthodique et sans complaisance des contraintes et exigences du secteur. Ainsi, le Programme de Redressement du Secteur de l’Energie (PRSE) comprenant un investissement de 520 Milliards de FCFA pour la production, le transport et la distribution a été mis en œuvre, en collaboration étroite avec les partenaires techniques au développement et bailleurs, à savoir : la Banque Mondiale, l’Agence Française de Développement, la Banque Islamique de Développement, la Banque Africaine de Développement, la Banque Ouest Africaine de Développement, KFW, la Banque Européenne d’Investissement, l’Export Développement Bank of Iran, l’Export-Import Développement Bank of China. Ce programme du Gouvernement est en cours d’exécution, suivant deux étapes : L’étape d’urgence, entre 2004 et 2008, est destinée à diligenter le rétablissement de l’équilibre entre l’offre et la demande et à mettre les réseaux de transport et de distribution en conformité avec les normes internationales en matière d’exploitation d’un service public d’Electricité, avec de nouvelles centrales très performantes à Bel Air 64 MW en 2006, à Kounoune 67 MW en 2008, et à Kahone 64MW (dont la mise en service est prévue en novembre 2008). Ainsi, le parc de production se renforce, entre 2003 et 2008, de 220 MW soit une augmentation de la capacité de 65% par rapport à 2000, sans oublier les régions intérieures avec 5 MW installés à Ziguinchor en 2006 et 10 autres MW en cours de négociation ; L’étape structurelle intègre, d’une part, la restructuration financière de Senelec avec 109 milliards de FCFA de recapitalisation (dont 65 milliards ont été versés à la Senelec en décembre 2007 par le Gouvernement, 24 milliards ont été versés en complément par la Banque mondiale le 25 septembre 2008, et pour compléter la France nous a accordé un appui supplémentaire de 31 milliards de FCFA disponible à partir de fin novembre 2008) pour rétablir l’équilibre économique de la société et résorber les résultats cumulés déficitaires de la Société (moins-140 Milliards en report à nouveau en 1999) hérités de votre gestion, et d’autre part, la diversification de l’énergie primaire, pour affranchir la société de la dépendance actuelle aux produits pétroliers. Rappelons que ces derniers génèrent des surcharges d’exploitation insupportables. C’est pourquoi le Gouvernement en application des directives et des orientations de Monsieur le Président de la République a fait le choix stratégique de recourir dorénavant aux énergies nouvelles et renouvelables, aux centrales hydroélectriques, au charbon et à l’énergie nucléaire. Dans ce cadre, une première tranche de 125 MW d’une centrale privée au charbon, dont le contrat de 118 milliards de FCFA a été signé en janvier 2008, sera mise en service à Sendou en 2010. Cette centrale permettra, avec 346 MW supplémentaires, de doubler la capacité de production léguée en 2000. Les coûts de productions très compétitifs, ouvrent une nouvelle et durable voie à la baisse des conditions tarifaires pour tous les usagers. Une seconde tranche au charbon de même puissance est retenue en 2011, et portera à 764 MW la capacité de production du pays, soit un renforcement de 140% par rapport à l’an 2000. Cela permettra de poursuivre le déclassement progressif du parc vétuste et non performant de votre héritage. Par ailleurs, je voudrais vous informer que Senelec est en négociation avancée avec des promoteurs privés de centrales : 1) à Biomasse de 30 MW à Ross Béthio, 2) à biocarburant de 60 MW, 3) éolienne de 15 MW et de 30 MW sur la grande côte prés de Saint Louis, 4) solaire de 7 MW à Ziguinchor,… etc. En outre, il convient de citer les projets en cours au niveau des organisations sous régionales au sein desquelles le Sénégal est membre, et bénéficie d’une quote-part en puissance et en énergie. En effet, sous notre magistère, l’OMVS est en train d’accélérer les centrales hydroélectriques de Felou de 60 MW et de Gouina de 140 MW. Il en est de même pour l’OMVG, avec les centrales de Sambangalou pour 128 MW et de Kaléta pour 240 MW. Voilà l’économie, d’une stratégie concrète, efficace et ambitieuse, Monsieur le secrétaire général, et ce n’est pas hasard, que tous nos partenaires au développement ont accepté de nous accompagner dans ce sens, ainsi que dans le processus de mise en œuvre de l’évolution institutionnelle de la Senelec. Monsieur le secrétaire général, il est de notre devoir de vous rappeler que les grands projets qui changent l’histoire d’un peuple ne profitent pas forcément aux bâtisseurs. Entre tenter de colmater des brèches conjoncturelles -ce que vous avez eu à faire pendant plusieurs décennies- et apporter une solution structurelle durable, il est de notre responsabilité aujourd’hui de nous investir dans la seconde voie. Certes, ce chemin n’est pas facile, c’est le chemin le moins fréquenté mais il nous faut sortir des sentiers inutilement battus par nos prédécesseurs pour tirer le Sénégal de son état de dépendance inacceptable, notamment dans le domaine de l’énergie. Si gouverner c’est savoir au juste la quantité d’avenir qu’on peut introduire dans le présent, gouverner le Sénégal requiert plus d’efforts et plus de talent. Car, s’il est vrai que notre mission d’aujourd’hui a pour ambition de répondre au quotidien aux besoins du citoyen et de garantir un héritage digne aux générations à venir ; le présent et l’avenir du Sénégal ont été fortement obérés et compromis par le patrimoine désastreux légué par le Parti Socialiste. Cette génération admirable qui a réussi l’alternance aux côtés d’un Grand Homme, est heureusement une génération pionnière dont seuls l’abnégation et le sens du devoir permettront au Sénégal de demain de rattraper le retard coupable accusé par le Sénégal d’hier. Dans le domaine de l’énergie, quelques exemples concrets et chiffrés suffisent à démontrer qu’entre hier et demain le Sénégal d’aujourd’hui dont la responsabilité nous incombe est à l’image d’un héritier sans héritage. Rien n’est à reconstruire ou à terminer, car tout est à faire. C’est pourquoi, nous sommes en train de mettre en œuvre les dispositions de l’évolution institutionnelle de la Senelec, avec un schéma industriel innovant de filialisation de la Production, du Transport et de la Distribution dans le cadre d’une holding qui implique le personnel de la Senelec à travers un Fonds de Pension, les consommateurs à travers un Fonds Mutuel de Consommateurs, le privé national et étranger. Dans cette perspective, notre dessein est de développer la performance et le challenge dans les métiers et activités de la Société, afin de renforcer l’investissement, en vue de garantir l’approvisionnement en énergie électrique sur toute l’étendue du pays ; et cela en quantité et qualité adéquates, et à des conditions économiques compétitives pour les ménages, l’industrie et les générations futures. Veuillez croire, Monsieur le Secrétaire Général, à l’assurance de ma considération distinguée.
Samuel A. SARR Ministre de l’Energie
Source: Las
Samuel A. SARR Ministre de l’Energie
Source: Las