
Car chaque 26 septembre, en même temps que nous commémorons un triste évènement, certains ont sur la conscience une catastrophe qui certainement aurait pu être évitée. Alors ils se demandent qu’est-ce qu’ils n’ont pas fait et qu’ils auraient du faire ? Quelle mauvaise décision ont-ils prise ? Enfin, quelle est leur part de responsabilité dans la mort de près de 2000 personnes ? C’est un lourd fardeau, difficile à supporter, et procès ou pas, ils sont déjà en train d’être punis par le tribunal de leur conscience. Mais dans le même temps, personne n’aime qu’on le regarde avec des yeux lui rappelant cette terrible responsabilité.
C’est donc compréhensible que la décision du juge Jean Wilfried Noël, du tribunal d’Evry, provoque une levée de boucliers chez les autorités sénégalaises. L’Etat du Sénégal ne va quand même pas laisser ses agents entre les mains d’un « petit juge français ». Ceci dit en passant, le magistrat est « devenu » petit juge uniquement parce qu’il a osé lancer des poursuites contre d’éminentes personnalités sénégalaises.
Mais le problème, c’est que ce ne sont pas les protestations et indignations du gouvernement qui pourront empêcher l’arrestation des 9 personnalités visées par les mandats d’arrêt internationaux lancés par le juge d’Evry, si jamais Mame Madior Boye et compagnie s’aventurent à quitter le pays. L’affaire est donc sérieuse et ébranle même notre amour propre de Sénégalais, d’où les manifestations de chauvinisme notées ici et là, et surtout de la part de nos autorités.
Il faut évidemment s’attendre à une véritable bataille judiciaire et une querelle juridique autour d’une question essentielle. Le juge français a-t-il le droit de poursuivre un premier ministre sénégalais ? De cette question découle une autre : Pourquoi les autorités gouvernementales sénégalaises se montrent-elles si choquées de voir un magistrat français chercher à situer les responsabilités en ce qui concerne le naufrage du bateau le Joola ? Une évidence : si la responsabilité directe de Mame Madior Boye est établie dans cette affaire, tous les regards se tourneront alors vers une seule personne : Le chef de l’Etat Me Abdoulaye Wade.
En effet Mame Madior Boye est certes un fusible, mais un fusible usagé, qui ne sert plus à grand chose. C’est donc pour éviter une telle humiliation que l’Etat s’est attaché les services d’un pool composé d’avocats, parmi les meilleurs du barreau de Dakar, pour défendre ses agents, mais aussi bien sûr lancer une contre-offensive de nature à amener Paris à remettre le « petit juge d’Evry » à sa place. Il ne s’agit donc pas uniquement d’une affaire judiciaire, elle est aussi politico-diplomatique.
Mais il faut tout de même reconnaître une chose. Qu’on la partage ou non, la décision du juge Jean Wilfried Noël présente au moins un mérite. Celui de nous rappeler qu’au sujet du bateau le Joola, nos gouvernants, nous ont tout dit, ils ont tout fait, sauf l’essentiel. L’essentiel étant de mener une enquête sérieuse, sur les circonstances du naufrage du navire dans la nuit du 26 septembre, et de situer les différentes responsabilités dans la chaîne de commandement. Ce qui n’a jamais été fait.
Une enquête express avait été menée, à l’époque, et dont les conclusions ont retenu comme seul responsable du naufrage la seule personne qui ne pouvait être entendue, ni poursuivie : Le capitaine du bateau, qui a perdu la vie dans le naufrage. On ne peut pas trouver mieux en matière d’humour noir. Le gouvernement est peut-être dans son bon droit, en trouvant des avocats pour défendre ses agents qui sont poursuivis par un magistrat étranger. Et effectivement se serait humiliant de voir l’ancien Premier ministre Mame Madior Boye à la barre du tribunal d’Evry pour répondre de sa responsabilité supposée dans le naufrage du bateau le Joola.
Mais qu’a-t-on fait pour nous éviter ce qui nous arrive aujourd’hui ? Rien. Aucun magistrat sénégalais n’a daigné examiner la moindre plainte relative à cette affaire. Pire, le chef de l’Etat lui-même avait déclaré dès le départ qu’il était hors de question de parler de procès. Il avait décidé tout seul du montant de l’indemnisation qu’il a arrêté à 10 millions de francs Cfa (on ignore d’ailleurs sur quelle base), avait promis de renflouer le bateau (ce qui n’a pas encore été fait), s’était engagé à faire des orphelins du naufrage des pupilles de la nation (Coïncidence ou pas, on remarque que la mise sur pieds d’une agence des pupilles de la nation survient au lendemain de l’émission des mandats d’arrêt.
C’est au moins un aspect positif de l’action du « petit juge français »), etc. Il avait aussi juré que les responsabilités allaient être situées et que les coupables sanctionnés (Mais maintenant on a compris qu’en ce qui concerne les sanctions, il s’agissait plutôt de trouver de nouvelles planques aux personnalités incriminées et limogées). Les familles des victimes l’avaient pris au mot, mais de toutes ces promesses, seule celle relative à l’indemnisation a été satisfaite dans l’immédiat.
Une indemnisation qui s’est faite parfois dans des conditions où la dignité des familles n’était pas le premier souci. Les autorités pousseront même le cynisme jusqu’à réprimer sévèrement une marche organisée par les Familles quelques temps seulement après le naufrage. Les manifestants ne demandaient qu’une seule chose : Toute la lumière sur les circonstances de la catastrophe. Il est utile de rappeler également que le Collectif des familles de victimes, né spontanément juste après le naufrage, avait été dissous par le ministre de l’Intérieur (Le Général Mamadou Niang) au profit d’une Association, jugée plus docile et surtout créée avec la bénédiction du gouvernement.
En outre, pour une catastrophe ayant fait près de 2000 morts, personne dans le pays ne s’est offusqué qu’il n’y ait jamais eu une enquête sérieuse – par une commission parlementaire ou indépendante – pour faire la lumière sur ce drame, pour au moins dire aux familles ce qui s’est réellement passé et dans quelles circonstances sont morts leurs proches. Aucun député n’a non plus interpellé le gouvernement à l’époque à travers une question orale ou d’actualité. Jusqu’à ce jour, le gouvernement n’a jamais dit aux Sénégalais ce qui s’est réellement passé dans la nuit du 26 au 27 septembre 2002. Parce qu’une chose est sûre, le gouvernement ne doit pas pouvoir dire : « Le familles ont été indemnisées donc nous sommes quittes »
Toutefois, cette désinvolture n’est pas l’apanage du régime de l’alternance, loin s’en faut. Qui se souvient encore de l’explosion à l’ammoniac de la Sonacos au début des années 90 ? A-t-on vraiment cherché à l’époque à situer les responsabilités ?
Il faut tout de même le reconnaître, Me Abdoulaye Wade avait dans le premier temps situé les responsabilités, en poussant d’abord à la démission les 2 ministres Youba Sambou et Youssoupha Sakho, mais aussi en prenant des sanctions au niveau des commandements de la marine et de l’armée de l’air. Un certain nombre de personnalités civiles et militaires avaient été démises de leur fonction, parce qu’elles étaient considérées comme ayant une responsabilité, aussi minime soit-elle, dans le naufrage du bateau.
Mais ces sanctions administratives semblent être le leurre qui a permis au gouvernement de détourner l’attention de l’opinion afin d’éviter toute procédure judiciaire dans ce dossier. En lisant la liste du juge Jean Wilfried Noël, on se rend compte que ce sont les mêmes personnes « sanctionnées » par Wade qui sont « pourchassées » par le magistrat français. En vérité le « petit juge français » est en train de faire aujourd’hui un travail que ses homologues sénégalais auraient dû faire depuis longtemps. C’est peut-être cela l’humiliation dont parlent les avocats commis par l’Etat.
Aujourd’hui l’Etat du Sénégal a décidé de lancer une riposte à l’action du juge français. Il ne s’agit pas seulement de défendre les personnalités incriminées devant le tribunal d’Evry, mais aussi d’engager des poursuites contre le « petit juge » pour « forfaiture et discrédit » portés aux institutions sénégalaises. Ce n’est pas tout. Le Sénégal entend aussi appliquer le principe de la réciprocité, pour montrer aux Français qu’on ne nargue pas impunément notre pays.
C’est ainsi que des poursuites judiciaires vont être lancées par la justice sénégalaise contre des personnalités françaises en exhumant notamment de vieux dossiers. Il s’agit notamment de l’affaire Mama Gualédou, cette jeune fille d’origine sénégalaise, qui a failli perdre la vie dans l’incendie d’un bus à Marseille (à souligner dans ce dossier que les auteurs de l’incendie ont tout de même été arrêtés puis jugés et condamnés). Il y a aussi l’incendie de l’hôtel Paris Opéra en 2005 qui avait fait plusieurs morts et blessés dont des Sénégalais. Il serait intéressant de savoir ce que ses familles pensent en ce moment du fait que les drames qui les ont frappé soient utilisés aujourd’hui comme des armes fatales par le gouvernement sénégalais dans la guerre judiciaire qu’il entend déclaré à la France.
Pourtant au moment des faits, on n’avait pas vraiment entendu le gouvernement se prononcer sur ces questions. Ni pour s’indigner ni pour témoigner de la solidarité aux familles. A ce que je sache, il n’y avait pas d’avocat sénégalais au procès de l’affaire Mama Galédou, à Marseille. Au début de ce mois, un Sénégalais a été tué en Espagne, mais on n’a pas encore entendu le porte-parole du gouvernement, ni la ministre des Sénégalais de l’Extérieur.
A cela il faut ajouter l’assassinat d’un Sénégalais en Russie, d’un autre en Guinée Equatoriale, etc. Autant d’affaires qui auraient dû faire l’objet d’une réaction ferme des autorités sénégalaises, pour que les fils de ce pays se sentent protéger par leur Etat, où qu’il puisse se trouver. Et c’est tant mieux si l’action du juge français contribue à réveiller nos gouvernants pour qu’ils se préoccupent un peu plus des conditions de vie des Sénégalais établis à l’étranger.
Par ailleurs, tout le monde savait, depuis au moins 3 ans, les autorités en premier, que la justice française avait reçu des plaintes dans l’affaire du Joola, qu’un juge d’Evry s’était saisi du dossier, avait ciblé des personnalités sénégalaises dont l’ancien Premier ministre Mame Madior Boye et s’apprêtait à lancer contre elles des poursuites. Mais depuis lors rien n’a été fait, ni sur le plan diplomatique, ni judiciaire pour trouver une solution.
Le « petit juge français » n’a fait que nous mettre devant nos responsabilités. Il nous fait savoir que le naufrage du bateau le Joola ne saurait passer par pertes et profits. Il fait son travail, alors assumons nos responsabilités
Samba Dialimpa BADJI
Journaliste
Source: Sud Quotidien
Photo: Illustration
C’est donc compréhensible que la décision du juge Jean Wilfried Noël, du tribunal d’Evry, provoque une levée de boucliers chez les autorités sénégalaises. L’Etat du Sénégal ne va quand même pas laisser ses agents entre les mains d’un « petit juge français ». Ceci dit en passant, le magistrat est « devenu » petit juge uniquement parce qu’il a osé lancer des poursuites contre d’éminentes personnalités sénégalaises.
Mais le problème, c’est que ce ne sont pas les protestations et indignations du gouvernement qui pourront empêcher l’arrestation des 9 personnalités visées par les mandats d’arrêt internationaux lancés par le juge d’Evry, si jamais Mame Madior Boye et compagnie s’aventurent à quitter le pays. L’affaire est donc sérieuse et ébranle même notre amour propre de Sénégalais, d’où les manifestations de chauvinisme notées ici et là, et surtout de la part de nos autorités.
Il faut évidemment s’attendre à une véritable bataille judiciaire et une querelle juridique autour d’une question essentielle. Le juge français a-t-il le droit de poursuivre un premier ministre sénégalais ? De cette question découle une autre : Pourquoi les autorités gouvernementales sénégalaises se montrent-elles si choquées de voir un magistrat français chercher à situer les responsabilités en ce qui concerne le naufrage du bateau le Joola ? Une évidence : si la responsabilité directe de Mame Madior Boye est établie dans cette affaire, tous les regards se tourneront alors vers une seule personne : Le chef de l’Etat Me Abdoulaye Wade.
En effet Mame Madior Boye est certes un fusible, mais un fusible usagé, qui ne sert plus à grand chose. C’est donc pour éviter une telle humiliation que l’Etat s’est attaché les services d’un pool composé d’avocats, parmi les meilleurs du barreau de Dakar, pour défendre ses agents, mais aussi bien sûr lancer une contre-offensive de nature à amener Paris à remettre le « petit juge d’Evry » à sa place. Il ne s’agit donc pas uniquement d’une affaire judiciaire, elle est aussi politico-diplomatique.
Mais il faut tout de même reconnaître une chose. Qu’on la partage ou non, la décision du juge Jean Wilfried Noël présente au moins un mérite. Celui de nous rappeler qu’au sujet du bateau le Joola, nos gouvernants, nous ont tout dit, ils ont tout fait, sauf l’essentiel. L’essentiel étant de mener une enquête sérieuse, sur les circonstances du naufrage du navire dans la nuit du 26 septembre, et de situer les différentes responsabilités dans la chaîne de commandement. Ce qui n’a jamais été fait.
Une enquête express avait été menée, à l’époque, et dont les conclusions ont retenu comme seul responsable du naufrage la seule personne qui ne pouvait être entendue, ni poursuivie : Le capitaine du bateau, qui a perdu la vie dans le naufrage. On ne peut pas trouver mieux en matière d’humour noir. Le gouvernement est peut-être dans son bon droit, en trouvant des avocats pour défendre ses agents qui sont poursuivis par un magistrat étranger. Et effectivement se serait humiliant de voir l’ancien Premier ministre Mame Madior Boye à la barre du tribunal d’Evry pour répondre de sa responsabilité supposée dans le naufrage du bateau le Joola.
Mais qu’a-t-on fait pour nous éviter ce qui nous arrive aujourd’hui ? Rien. Aucun magistrat sénégalais n’a daigné examiner la moindre plainte relative à cette affaire. Pire, le chef de l’Etat lui-même avait déclaré dès le départ qu’il était hors de question de parler de procès. Il avait décidé tout seul du montant de l’indemnisation qu’il a arrêté à 10 millions de francs Cfa (on ignore d’ailleurs sur quelle base), avait promis de renflouer le bateau (ce qui n’a pas encore été fait), s’était engagé à faire des orphelins du naufrage des pupilles de la nation (Coïncidence ou pas, on remarque que la mise sur pieds d’une agence des pupilles de la nation survient au lendemain de l’émission des mandats d’arrêt.
C’est au moins un aspect positif de l’action du « petit juge français »), etc. Il avait aussi juré que les responsabilités allaient être situées et que les coupables sanctionnés (Mais maintenant on a compris qu’en ce qui concerne les sanctions, il s’agissait plutôt de trouver de nouvelles planques aux personnalités incriminées et limogées). Les familles des victimes l’avaient pris au mot, mais de toutes ces promesses, seule celle relative à l’indemnisation a été satisfaite dans l’immédiat.
Une indemnisation qui s’est faite parfois dans des conditions où la dignité des familles n’était pas le premier souci. Les autorités pousseront même le cynisme jusqu’à réprimer sévèrement une marche organisée par les Familles quelques temps seulement après le naufrage. Les manifestants ne demandaient qu’une seule chose : Toute la lumière sur les circonstances de la catastrophe. Il est utile de rappeler également que le Collectif des familles de victimes, né spontanément juste après le naufrage, avait été dissous par le ministre de l’Intérieur (Le Général Mamadou Niang) au profit d’une Association, jugée plus docile et surtout créée avec la bénédiction du gouvernement.
En outre, pour une catastrophe ayant fait près de 2000 morts, personne dans le pays ne s’est offusqué qu’il n’y ait jamais eu une enquête sérieuse – par une commission parlementaire ou indépendante – pour faire la lumière sur ce drame, pour au moins dire aux familles ce qui s’est réellement passé et dans quelles circonstances sont morts leurs proches. Aucun député n’a non plus interpellé le gouvernement à l’époque à travers une question orale ou d’actualité. Jusqu’à ce jour, le gouvernement n’a jamais dit aux Sénégalais ce qui s’est réellement passé dans la nuit du 26 au 27 septembre 2002. Parce qu’une chose est sûre, le gouvernement ne doit pas pouvoir dire : « Le familles ont été indemnisées donc nous sommes quittes »
Toutefois, cette désinvolture n’est pas l’apanage du régime de l’alternance, loin s’en faut. Qui se souvient encore de l’explosion à l’ammoniac de la Sonacos au début des années 90 ? A-t-on vraiment cherché à l’époque à situer les responsabilités ?
Il faut tout de même le reconnaître, Me Abdoulaye Wade avait dans le premier temps situé les responsabilités, en poussant d’abord à la démission les 2 ministres Youba Sambou et Youssoupha Sakho, mais aussi en prenant des sanctions au niveau des commandements de la marine et de l’armée de l’air. Un certain nombre de personnalités civiles et militaires avaient été démises de leur fonction, parce qu’elles étaient considérées comme ayant une responsabilité, aussi minime soit-elle, dans le naufrage du bateau.
Mais ces sanctions administratives semblent être le leurre qui a permis au gouvernement de détourner l’attention de l’opinion afin d’éviter toute procédure judiciaire dans ce dossier. En lisant la liste du juge Jean Wilfried Noël, on se rend compte que ce sont les mêmes personnes « sanctionnées » par Wade qui sont « pourchassées » par le magistrat français. En vérité le « petit juge français » est en train de faire aujourd’hui un travail que ses homologues sénégalais auraient dû faire depuis longtemps. C’est peut-être cela l’humiliation dont parlent les avocats commis par l’Etat.
Aujourd’hui l’Etat du Sénégal a décidé de lancer une riposte à l’action du juge français. Il ne s’agit pas seulement de défendre les personnalités incriminées devant le tribunal d’Evry, mais aussi d’engager des poursuites contre le « petit juge » pour « forfaiture et discrédit » portés aux institutions sénégalaises. Ce n’est pas tout. Le Sénégal entend aussi appliquer le principe de la réciprocité, pour montrer aux Français qu’on ne nargue pas impunément notre pays.
C’est ainsi que des poursuites judiciaires vont être lancées par la justice sénégalaise contre des personnalités françaises en exhumant notamment de vieux dossiers. Il s’agit notamment de l’affaire Mama Gualédou, cette jeune fille d’origine sénégalaise, qui a failli perdre la vie dans l’incendie d’un bus à Marseille (à souligner dans ce dossier que les auteurs de l’incendie ont tout de même été arrêtés puis jugés et condamnés). Il y a aussi l’incendie de l’hôtel Paris Opéra en 2005 qui avait fait plusieurs morts et blessés dont des Sénégalais. Il serait intéressant de savoir ce que ses familles pensent en ce moment du fait que les drames qui les ont frappé soient utilisés aujourd’hui comme des armes fatales par le gouvernement sénégalais dans la guerre judiciaire qu’il entend déclaré à la France.
Pourtant au moment des faits, on n’avait pas vraiment entendu le gouvernement se prononcer sur ces questions. Ni pour s’indigner ni pour témoigner de la solidarité aux familles. A ce que je sache, il n’y avait pas d’avocat sénégalais au procès de l’affaire Mama Galédou, à Marseille. Au début de ce mois, un Sénégalais a été tué en Espagne, mais on n’a pas encore entendu le porte-parole du gouvernement, ni la ministre des Sénégalais de l’Extérieur.
A cela il faut ajouter l’assassinat d’un Sénégalais en Russie, d’un autre en Guinée Equatoriale, etc. Autant d’affaires qui auraient dû faire l’objet d’une réaction ferme des autorités sénégalaises, pour que les fils de ce pays se sentent protéger par leur Etat, où qu’il puisse se trouver. Et c’est tant mieux si l’action du juge français contribue à réveiller nos gouvernants pour qu’ils se préoccupent un peu plus des conditions de vie des Sénégalais établis à l’étranger.
Par ailleurs, tout le monde savait, depuis au moins 3 ans, les autorités en premier, que la justice française avait reçu des plaintes dans l’affaire du Joola, qu’un juge d’Evry s’était saisi du dossier, avait ciblé des personnalités sénégalaises dont l’ancien Premier ministre Mame Madior Boye et s’apprêtait à lancer contre elles des poursuites. Mais depuis lors rien n’a été fait, ni sur le plan diplomatique, ni judiciaire pour trouver une solution.
Le « petit juge français » n’a fait que nous mettre devant nos responsabilités. Il nous fait savoir que le naufrage du bateau le Joola ne saurait passer par pertes et profits. Il fait son travail, alors assumons nos responsabilités
Samba Dialimpa BADJI
Journaliste
Source: Sud Quotidien
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